dimanche 29 mars 2020

Crise sanitaire, faillite politique, par Alain Bertho

En décembre 2019, on pouvait lire sur une banderole d’hospitaliers mobilisés : « L’État compte les sous, on va compter les morts ». Nous y sommes. Ces deux comptes là sont antagoniques. Quand nous aurons vaincu le Covid-19, il nous faudra encore gagner la bataille de la vie contre les logiques financières dont nous savons maintenant qu’elles sont, au plein sens du terme, mortifères. 

Nous sommes passés en une semaine de l’appel aux urnes aux contrôles de police dans les rues. Nul ne conteste la gravité de la situation sanitaire planétaire, son incertitude quant à sa durée et à ses effets. Mais cette crise n’est-elle que sanitaire ? 

Le 22 mars 2020, une semaine après les mesures de confinement, un sondage IFOP-JDD mesure la confiance des Français dans celles et ceux qui les gouvernent : 64% d’entre eux pensent que ce gouvernement cache des informations, 71% qu’il n’a pas agi rapidement, et 61 % qu’il ne donne pas tous les moyens aux infrastructures et aux professionnels de santé pour lutter contre ce virus. 

Journalistes et ministres nous répètent chaque jour que le pays n’a pas pris conscience de la gravité de la crise et proposent d’accroître la répression. Tous les soirs à 20 heures les villes retentissent des applaudissements spontanés en remerciement à la mobilisation des soignants privés de matériel de base.

samedi 28 mars 2020

Quelques éléments de réflexion sur différents aspects de la crise du coronavirus

Une réflexion de l’équipe d’animation du Réseau pour l'Autogestion, les Alternatives, l'Altermondialisme, l'Ecologie et le Féminisme 

L’extension de la pandémie de coronavirus et les mesures de confinement de la population qui se généralisent dans de nombreuses régions du monde créent une situation inédite à l’échelle planétaire. Cette crise sanitaire, économique, sociale mais aussi politique laissera des traces profondes dans nos sociétés. 

1) Comme pour d’autres virus dits « émergents » ces dernières années (Ebola, Zika…), il semble que l’apparition de cette maladie ait son origine dans la pression que les activités humaines font peser sur l’environnement (déforestation, productivisme…) et qui favorise le franchissement de la barrière des espèces. 

Pour autant, le développement de la pandémie en Europe prend une ampleur particulière qui renvoie aux politiques d’austérité et de casse des services publics menées un peu partout depuis des décennies, en particulier dans les services de santé : diminution continue du nombre de lits dans les hôpitaux, fermeture de services dans les hôpitaux de proximité et concentration des structures hospitalières, place grandissante de l’hospitalisation privée. 

En France, dès avant la survenue de l’épidémie, la pénurie de médecins du fait du numérus clausus et les effets délétères de la tarification à l’activité (T2A) avaient déjà largement fragilisé notre système de santé. Ces politiques austéritaires démontrent aujourd’hui leur caractère criminel et de plus en plus de gens en prennent conscience (voir l’expression dans les médias de nombreux professionnels de santé pas forcément « de gauche » et la multiplication des manifestations de solidarité aux fenêtres). 

"Plus jamais ça ! Préparons le 'jour d'après'". Appel commun

"Plus jamais ça ! Préparons le 'jour d'après'", 18 responsables d'organisations syndicales, associatives et environnementales parmi lesquels Philippe Martinez (CGT), 
Aurélie Trouvé (Attac), Jean-François Julliard (Greenpeace) et Cécile Duflot (Oxfam), etc..

En mettant le pilotage de nos sociétés dans les mains des forces économiques, le néolibéralisme a réduit à peau de chagrin la capacité de nos États à répondre à des crises comme celle du Covid. 

La crise du coronavirus qui touche toute la planète révèle les profondes carences des politiques néolibérales. Elle est une étincelle sur un baril de poudre qui était prêt à exploser. Emmanuel Macron, dans ses dernières allocutions, appelle à des "décisions de rupture" et à placer "des services (…) en dehors des lois du marché". 

Nos organisations, conscientes de l’urgence sociale et écologique et donnant l'alerte depuis des années, n’attendent pas des discours mais de profonds changements de politiques, pour répondre aux besoins immédiats et se donner l'opportunité historique d'une remise à plat du système, en France et dans le monde. 

vendredi 27 mars 2020

Franck Gaudichaud : « Regardons le Chili pour comprendre dans quel monde on veut nous faire vivre »

Docteur en sciences politiques et professeur à l’Université Toulouse Jean Jaurès où il enseigne l’histoire de l’Amérique latine, Franck Gaudichaud revient d’un séjour au Chili. L’auteur de « Chili 1970-1973 : Mille jours qui ébranlèrent le monde » nous a accordé un entretien pour évoquer les cinq mois d’agitation sociale qui ont secoué ce pays

L’insurrection chilienne a commencé en octobre 2019 et s’est répandue comme une traînée de poudre au sein du mouvement étudiant suite à la décision du gouvernement de Piñera d’augmenter le prix du ticket de métro. La répression contre la jeunesse a fini par rassembler la société tout entière, non plus contre l’augmentation du prix des transports, mesure retirée depuis, mais contre le système néolibéral hérité de la dictature de Pinochet dans son ensemble. 

Le 22 octobre, alors que l’on dénombre déjà une dizaine de morts, plus de 80 blessés dont certains par balles, que des actes de torture et d’agressions sexuelles sont commis par les militaires, que ceux-ci patrouillent dans Santiago pour faire respecter le couvre-feu, le président Sebastian Piñera se rétracte. Il exprime publiquement des excuses au peuple chilien et annonce des mesures sociales censées calmer la fougue des insurgés : hausse du salaire minimum, hausse de 20 % des pensions de retraite les plus basses, annulation de la récente augmentation de 9,2 % des tarifs de l’électricité, création d’une nouvelle tranche d’impôts pour les revenus supérieurs à 8 millions de pesos mensuels, réduction des salaires des parlementaires… 

Report de la réunion du 4 avril "De l'hégémonie sociale à l'hégémonie politique".

En raison de la situation sanitaire et politique actuelles, la réunion "De l'hégémonie sociale à l'hégémonie politique?" du 4 avril est reportée.

Le thème prévu sera affiné en fonction de l’actualité. 

Nous espérons pouvoir la tenir le vendredi 8 mai ; réservez cette date, que nous vous confirmerons mi-avril, en fonction du contexte sanitaire. 

Nous vous espérons en bonne santé et sommes impatient.es de vous retrouver.

mercredi 25 mars 2020

La pandémie du capitalisme, le coronavirus et la crise économique, par Eric Toussaint

Une crise de santé publique 

La pandémie du coronavirus constitue un gravissime problème de santé publique et les souffrances humaines que la diffusion du virus va provoquer seront énormes. S’il atteint massivement des pays du Sud Global dont le système de santé publique, déjà faible ou très fragile, a été terriblement mis à mal par 40 ans de politiques néolibérales, les décès seront très nombreux. Sans oublier la situation dramatique de la population iranienne victime du blocus décrété par Washington, blocus qui inclut l’introduction de médicaments et d’équipement médical. 

Grands médias et gouvernements mettent l’accent sur les différences de taux de mortalité en fonction de l’âge mais se gardent bien d’attirer l’attention sur les différences de classe et sur comment la mortalité due à la pandémie du coronavirus va affecter les êtres humains selon leurs revenus et leur patrimoine.

Utilisant le prétexte de la nécessaire austérité budgétaire pour rembourser la dette publique, les gouvernements et les grandes institutions multilatérales comme la Banque mondiale, le FMI et les banques régionales telle la Banque africaine de développement ont généralisé des politiques qui ont détérioré les systèmes de santé publique : suppression de postes de travail dans le secteur de la santé, précarisation des contrats de travail, suppression de lits d’hôpitaux, fermeture de postes de santé de proximité, augmentation du coût de la santé tant au niveau des soins que des médicaments, sous-investissements dans les infrastructures et les équipements, privatisation de différents secteurs de la santé, sous-investissement public dans la recherche et le développement de traitements au profit des intérêts de grands groupes privés pharmaceutiques… 

Sauver l'économie capitaliste ou sauver la planète, par Benoît Borrits

La crise sanitaire a imposé le confinement de la population qui induit une chute spectaculaire de la production. Les États multiplient les mesures de soutien aux entreprises pour éviter les faillites en cascade. Pour quelle finalité ? Relancer le capitalisme ou mettre en place une démocratie économique qui nous permettra de sauver la planète ? 

Cette pandémie, dont on ne connaît pas encore le dénouement, a ceci d’extraordinaire qu’elle réalise ce que tout le monde savait. Le confinement et les ruptures de chaînes d’approvisionnement provoquent une baisse brutale de la production. Voilà que nous découvrons avec cette récession que Venise retrouve ses eaux claires et ses poissons, que les émissions de gaz à effet de serre ont été réduites de 25 % en Chine au début de l’année (1), que l’air devient plus respirable. Il est terrible d’avoir attendu cette crise sanitaire et cette succession dramatique de décès pour prendre conscience de ces évidences. 

Et voilà que pullule sur Internet des appels à changer radicalement de vie à l’issue de cette épidémie. D’autres se demandent même si cette pandémie n’est pas une bénédiction pour la planète. Peut-être… à condition de stopper définitivement ce que les anglo-saxons appellent le Business as usual (2). 

vendredi 20 mars 2020

L'épreuve politique de la pandémie, par Pierre Dardot et Christian Laval

« Ce que nous vivons laisse entrevoir ce qui, avec le changement climatique, attend l’humanité dans quelques décennies si la structure économique et politique du monde ne change pas. » 

La pandémie du Covid-19 est une crise sanitaire, économique et sociale globale d’un niveau exceptionnel. Peu d’événements historiques peuvent lui être comparés, du moins à l’échelle des dernières décennies. Cette tragédie, dès maintenant, est une épreuve pour toute l’humanité. Épreuve au double sens du mot : douleur, risque et danger d’une part ; test, évaluation, jugement de l’autre. 

Ce que la pandémie met à l’épreuve, c’est la capacité des organisations politiques et économiques à faire face à un problème global lié aux interdépendances individuelles, autrement dit qui touche à la vie sociale la plus élémentaire. 

Comme une dystopie qui serait devenue réalité, ce que nous vivons laisse entrevoir ce qui, avec le changement climatique, attend l’humanité dans quelques décennies si la structure économique et politique du monde ne change pas très rapidement et très radicalement. 

jeudi 12 mars 2020

Covid-19 : un virus très politique, par Patrick Silberstein

Je vais commencer par vous raconter une histoire. Au mois d’août 1940, alors que la Luftwaffe écrasait Londres sous les bombes, les politiciens bourgeois britanniques ont eu beaucoup de réticences à ouvrir le métro pour que la population puisse s’y réfugier. Il a fallu l’intervention de la gauche – peu importe laquelle – pour qu’ils cèdent à ce besoin élémentaire. Par intervention, il faut bien entendu entendre des prises de position, mais aussi des actions directes et une mobilisation. 

À ce moment particulier, l’Angleterre impériale qui ne savait plus à quel saint se vouer a été contrainte de céder à la pression populaire et à demander l’« aide » de son prolétariat pour faire face aux bombes et à l’hypothèse d’une invasion nazie (1). 

N’ayez crainte, je ne me suis pas trompé de discussion et j’imagine que vous avez entrevu le sens de ce rappel historico-métaphorique rapporté à la crise sanitaire à laquelle nous sommes confronté·es (2). C’est bel et bien de l’épidémie de coronavirus et de « nos » tâches que je voudrais dire quelques mots. 

jeudi 5 mars 2020

Se fédérer pour l’émancipation Réunion – Débat De l’hégémonie sociale à l’hégémonie politique RENCONTRE ANNULEE

En raison de la crise sanitaire actuelle, cette journée de réflexion annoncée le 4 avril  est repoussée .


Se fédérer pour l’émancipation Réunion – Débat De l’hégémonie sociale à l’hégémonie politique Samedi 4 avril, de 9h30 à 17h 31 rue de la Grange aux Belles 75010 Paris (Métro Fabien) 

co-organisé par l’Association Autogestion (AA), l’Association des communistes unitaires (ACU), les Amis de Tribune socialiste (ATS), Cerises, l’Observatoire des mouvements de la société (OMOS), le Réseau pour l’autogestion, les alternatives, l’altermondialisme, l’écologie et le féminisme (AAAEF), le Temps des Lilas et l’Union syndicale Solidaires. 

Pour le buffet, s’inscrire auprès de sylvie.larue@wanadoo.fr 

Passer de la résistance à l’alternative ? 

Le mouvement social a affirmé qu'il continuerait tant qu'il n'a pas obtenu satisfaction. Il déborde largement l'espace syndical ou l'espace des partis politiques.