Le cinquantième anniversaire de mai et juin 1968 sera l’occasion de commémorations où, à n’en pas douter, beaucoup sera dit, le meilleur comme le pire, mais aussi beaucoup risque de rester dans le silence.
Mai et juin 1968 ne furent pas qu’une rébellion étudiante, pas plus qu’on ne saurait la restreindre à une simple révolution culturelle des mœurs. Ce fut une grève générale inédite, en France la plus importante du 20ème siècle avec neuf millions de grévistes, ce fut une crise sociale, politique où s’est posée concrètement la question non seulement des pouvoirs, mais du pouvoir politique lui-même.
Si la « révolution de mai » n’a pas triomphé, elle ne fut pas défaite. Au cours de ces semaines une profonde aspiration des individus à décider collectivement de leur présent et de leur futur, dans les lieux de travail, dans les quartiers et les campagnes est apparue ; loin de s’éteindre, elle s’est renforcée dans les années suivantes.
L’autogestion : en plein mois de mai le mot est prononcé. Il sort enfin des cercles militants restreints qui s’intéressaient aux expériences du passé (Russie, Espagne, etc.) comme à celles plus proches de la Yougoslavie, de l’Algérie.
Le terme est repris par un syndicat de salariés, la CFDT, qui va en faire son étendard dans les années qui suivent.
Mais au-delà des mots, pouvoir ouvrier, pouvoir étudiant, pouvoir paysan, pouvoir populaire, qu’en est-il en réalité en mai et juin 1968 ?
Les entreprises sont occupées, c’est une remise en cause du droit de propriété, certes. Mais comment s’organisent les personnels en lutte, les assemblées générales élisent t’elles des délégués ou les comités de grève se réduisent t’ils à l’intersyndicale ?
Les femmes, les travailleurs immigrés, les cadres, les jeunes étaient nombreux dans l’action. Etaient-elles/ils fondu.e.s indistinctement ou bien existait-il des cadres formalisés ou non spécifiques ? On critique l’aliénation, on défie le pouvoir patronal mais envisage t’on des productions alternatives ?
L’occupation est-elle statique ou va-t-on – comme ce sera le cas à Lip cinq ans plus tard – jusqu’à faire redémarrer l’outil de travail au service de la lutte ?
Les cas les plus avancés sont un peu connus : la « Commune de Nantes », les « soviets » du CEA de Saclay, la sortie sous contrôle syndical de la presse quotidienne, la Sorbonne, les Beaux-Arts. Ils sont rares, et sont devenus des mythes. Il y a lieu de les faire connaître à nouveau, et plus largement encore. Et puis, il y a sans doute de nombreuses expériences qui restent encore dans l’ombre.
Cette journée s’inscrit dans une réflexion plus vaste sur l’actualité de l’autogestion tant dans les luttes que les dans les discussions programmatiques, que nous entendons poursuivre. Il s’agit donc d’une étape.
Notre objectif, au cours de cette journée, est de faire connaître ces expériences, d’en comprendre la portée, les obstacles auxquels elles se sont heurtées, comment elles ont véritablement fonctionné, dans les entreprises, les établissements scolaires, les quartiers et les campagnes, ainsi que les stratégies des acteurs.
Nous qui organisons cette journée nous connaissons certains des acteurs et actrices, des chercheurs et chercheuses qui ont vécu ou travaillé sur cette période, mais nous sommes certains que beaucoup d’autres existent dont les témoignages, les réflexions, les documents collectés ont une valeur inestimable et qu’il faut porter à la connaissance des générations nouvelles.
Vous voulez participer d’une manière ou d’une autre à cette journée, vous pouvez nous écrire pour apporter votre témoignage, votre contribution (en intervenant, en envoyant un texte écrit, des documents textes, audio, video), en acceptant d’être enregistrés) en nous indiquant où vous étiez en mai et juin 1968 (entreprise, quartier, établissement) et en nous laissant vos coordonnées.
écrire à autogestion68@gmail.com
Premiers initiateurs : Alternatives et autogestion (AA) ; Association pour l’autogestion AA) ; Association des communistes unitaires (ACU) ; Amis de Tribune socialiste (ATS) ; Observatoire des mouvements de la société (OMOS) ; Réseau pour l’autogestion les alternatives l’altermondialisme l’écologie le féminisme (AAAEF) ; Solidarité écologie gauche alternative (SEGA) ; éditions Syllepse ; Union syndicale Solidaires
Oui, c'est rtès important et mai 68 doit servir d'exemple. Dans les mobilisations massives contre les réformes de retraites, les lois travail, pendant les journées d'action, on espère presque que les employés des transports en commun ne soient pas trop en grève pour pouvoir se rendre aux manifs. On se plaint du traitement de la presse audio-visuelle qui, avant même que la manif parisienne ne débute, affirme qu'il n'y a eu personne. Alors qu'il aurait fallu que les grévistes réquisitionnent leur outil pour le mettre au service des manifestant-es.
RépondreSupprimerJe sais c'est plus facile à dire qu'à faire mais que la commémoration de mai 68 serve à cela
Jacques P.