"L’Etat d’Israël a fait sien le droit international, et celui-ci interdit à tout État qui a adopté le droit international, d’appliquer ses lois sur des territoires qui ne font pas partie de sa souveraineté. S’il le fait quand même […] il apparaît comme un État d’apartheid, ce que nous ne sommes pas. Il n’y a aucune ambiguïté : Israël n’a tout simplement pas le droit d’appliquer des lois de la Knesset sur des territoires qui ne font pas partie de sa souveraineté."
Cette citation n’est pas de Gideon Levi ou de la députée de la Liste [arabe] Unifiée, Haneen Zoabi, mais de Reuven Rivlin, Président de l’État d’Israël. Ce ne sera pas la première fois que cet ultra-nationaliste qui vient de l’aile droite du Likoud, se sent obligé de faire la morale à Benjamin Netanyahou, et de lui rappeler et le droit et le bon sens.
Quelle est la nouvelle bêtise qui oblige le Chef de l’État à sortir du devoir de réserve qui le lie à sa fonction ?
Il s’agit de la loi, votée récemment par la majorité, qui autorise d’exproprier des terres appartenant a des résidents palestiniens de Cisjordanie pour les donner à des colonies. Du vol tout simplement.
Pendant prés de 50 ans les forces d’occupation et les administrations coloniales cachaient leur prédation foncière par des considérations de sécurité, ou encore en prétendant que la propriété privée n’était pas prouvée par des documents adéquats.
Avec la nouvelle loi, les masques tombent, et le vol n’est plus camouflé.
Cette loi, à laquelle Netanyahou s’était initialement opposé ("elle nous amènera à la Cour Pénale Internationale"), est avant tout une déclaration politique de l’extrême droite au pouvoir, et en particulier de Naftali Benett et de son parti, qui annoncent au monde entier que le projet du "Grand Israël" c’est maintenant, et que le bluff des "deux états" doit être définitivement enterré.
Le caractère criminel de cette loi risque, pour Benett et ses amis, d’être dénoncé par la Cour Suprême qui vraisemblablement déclarera la loi comme anticonstitutionnelle. Qu’a cela ne tienne : on y introduira une clause qui exige une majorité qualifiée de juges pour annuler la loi, en attendant la nouvelle loi de la ministre de la justice Ayelet Shaked qui vise à réduire substantiellement les pouvoirs de ce qui reste une des dernières barrières à l’arbitraire absolu de la majorité gouvernementale.
"La balle est maintenant dans le camp de la communauté internationale" a déclaré le dirigeant palestinien Jibril Rajoub. Celle-ci s’est exprimé par la voix de deux de ses portes paroles : Theresa May et Angela Merkel n’ont pas mâché leurs mots pour critiquer cette grave atteinte au droit ; "notre confiance dans l’engagement des dirigeants israéliens pour une solution basée sur deux états est sérieusement ébranlée" a déclaré le ministère allemand des affaires étrangères. Quant à François Hollande, il a demandé aux dirigeants israéliens d’annuler la loi.
La réaction la plus significative reste celle du secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres qui a déclaré : "cette loi est contraire au droit international , et elle aura des implications juridiques significatives pour les dirigeants israéliens."
Ces implications internationales, l’éditorialiste Gideon Levi les décrit très concrètement (Haaretz, 9.2.2017) : "c’est sympa que l’Allemagne dénonce… et les déclarations de Theresa May et de Mogherini sont encourageantes, mais cela ne suffit plus ; il est impératif de stopper ce déchainement, et cela ne peut se faire que par des actes. Un nouveau régime d’apartheid est ne au 21eme siècle […] Comment réagit quelqu’un pour qui le droit compte, face à une violation de ce droit ? En espérant que le criminel soit traduit devant la justice. Il n’y a qu’un tribunal qui peut, qui doit juger le nouveau régime d’apartheid : la Cour Pénale Internationale de la Haye.
Si Jibril Rajoub est sérieux dans sa déclaration, il doit déposer plainte devant la Cour Pénale de la Haye. Ce sera faire bon usage de la décision bâtarde de l’ONU de reconnaître la Palestine comme un quasi-Etat".
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